Privé de désert (des cactus plein les poches et du sable plein les dents)
Superstition Mountain, la montagne
sacrée des apaches. Un dédale infernal de pierres et de sable. Sans
point d'eau et peuplé de crotales. Peu de coyotes s'étaient risqué
dans ce coin là et les os de ces foies jaunes blanchissaient depuis
au soleil... En perdition dans les monts de la superstition, sur les
traces de la mine de l'allemand perdu et de la mine de plomb dans
l'aile, Blondin se tordait de douleur devant moi. Les apaches étaient
à nos trousses et nos trousses étaient vides : plus une goutte
d'encre de chine et guère que des chiures de gommes pour
subsister... Mais bien plus grave, le bougre venait d'être mordu par
un satané rattle-snake! Cette vieille crapule de "Prosit"
Luckner avait logé le serpent dans sa botte avant que je ne le
farcisse de plomb, vidant le magasin de ma Winchester sur cette
ordure nauséabonde...
- "Arrrrgh! Blood and guts Tuco!
Cette vieille crapule de "Prosit" Luckner a logé ce
serpent dans ma botte! Cette saloperie vient de m'inoculer le venin
de l'abandon! Retire mon nom du blog! J'arrête de poster !
-
Mille putois! Dis donc pas de conneries fiston! (comme j'aime souvent
à l'appeler, car après tout j'ai presque un mois de plus que lui)
Saute en selle derrière moi et dès demain tu re-crayonneras comme
un jeune maverick en marge du troupeau!
-Demi-tour espèce de
vieux cinglé! Tu vas te faire descendre et tu ne peux rien pour moi!
'Plus envie de poster! Je fais rien qu'à dessiner moche comme
tout... Mes crobards? ça ne vaut pas tripette, pas même de la
fiente d'Arzach! Et pis en plus je suis lent, j'ai mauvaise haleine
et je louche d'un oeil. Et ça encore c'est dans les bons jours! Non
vraiment, continue sans moi ,je vais te retarder..."
Impossible de
le raisonner, le venin faisant son effet, la folie le tenait. Je
tentais une ultime fois de le convaincre de poster ses croquis juste
pour le plaisir, sans se prendre la tête ni chercher à prouver quoi
que ce soit, mais rien n'y fit, le pauvre bougre délirait sec... Las
et résigné, je lui laissais mon dernier carnet à croquis ainsi
qu'Esra ma vieille mule à la caboche aussi têtue que la sienne au
cas où il changerait d'avis et je filais me mettre à l'abri, hors
d'atteinte des flèches indiennes. « So long old chap et
prends soin de ton scalp... »
L'année commence donc avec
une re-démission de Blondin, qui n'avait du reste guerre posté
depuis son 1er avertissement. Cette fois difficile de lui faire
changer d'avis. Ne pouvant me résoudre à braquer continuellement un colt chargé
sur sa tempe pour qu'il finisse ses illustrations et
daigne nous en faire profiter, j'abandonne à mon tour l'idée de lui
faire abandonner l'idée d'abandonner (enfin bon, j'me comprends). A
moins que... A moins que vous ne le croisiez un jour sur une piste
aride et poussiéreuse et que vous en remettiez une couche et essayiez de le persuader de ne pas garder ses enluminures pour lui...
En
attendant, tel un poor lonesome corniaud, je me remets en selle en
prenant soins de néanmoins lui laisser un double des clés du
Saloon. Si l'envie le reprenait, il y aurait toujours une chope de
bière bien fraîche sur le piano pour faire passer le chili trop
épicé, une bouteille de tord boyaux sur la table de poker et ses
gribouillis charbonneux seraient toujours les bienvenus...
El Senor Tuco (aidé par J-M Charlier, J Giraud, Hermann & Co pour l'inspiration)
Mille putois mais c'est cette veille barrique de McClure!